Diriger une équipe sportive suppose d’appréhender motivations personnelles et cohérence de groupe, des problématiques bien connues des entrepreneurs. Les codes sportifs, sources d’inspiration pour l’entreprise ?
(1) Savoir gérer l’échec
Victoire et défaite font partie du système sportif. Aucun athlète de haut niveau n’affiche un taux de réussite de 100%. Un champion du monde est parvenu à transformer l’échec. Cela est constitutif de sa performance. Un créateur d’entreprise doit posséder cette même capacité.
Autre dimension : un entraîneur sportif doit savoir appréhender les défaites d’une équipe. Cette gestion s’appuie sur des dimensions très émotionnelles, ceci d’autant plus que la performance d’un groupe est parfois testée et mise sous les feux de la rampe médiatique plusieurs fois par semaine. Un chef d’entreprise peut s’inspirer de ces techniques lorsque les succès ne sont pas au rendez-vous, même si les tensions sont souvent moins exacerbées que dans le sport tant que les salaires sont payés.
(2) S’inspirer du mental des champions
Le créateur d’entreprise doit, comme le sportif de haut niveau s’astreindre à une hygiène de vie lui permettant d’être performant à court et long termes, que ce soit aux niveaux du sommeil, de la nourriture ou même de l’alcool.
Le sportif de haut niveau cultive une motivation intrinsèque très forte : plus que le résultat, l’exercice de son activité à un niveau d’excellence est la source de sa motivation. L’entrepreneur fonctionne à peu près de la même façon.Un employé ne raisonne pas forcément comme cela : il est sans doute plus souvent animé par des motivations extrinsèques qui peuvent être, par exemple, la reconnaissance d’autrui ou le salaire.
(3) Le sportif, source d’inspiration de l’entrepreneur
L’entrepreneur doit avoir les qualités d’un athlète de haut niveau : engagement, passion, capacité à apprendre et à transformer les échecs. Le créateur d’entreprise doit également posséder une capacité à visualiser le succès, être ancré dans un cercle vertueux.
Entrepreneur et entraîneur ont également comme point commun d’être des personnages passionnés. Mais c’est là qu’apparaît un point de divergence fondamental entre les deux univers : lorsque vous évoluez dans le monde du sport, tout le monde est transporté par son activité, que ce soit le sportif que vous dirigez ou le kinésithérapeute du club.
En entreprise, les gens que vous recrutez ne sont pas forcément passionnés par ce qu’ils font. Les outils de management sont donc sensiblement différents que dans le monde du sport tout simplement parce que vous ne pouvez pas aller aussi loin avec des employés qu’avec des athlètes.
Ainsi, si l’entreprise, comme dans le sport, adopte des types de management directifs où les employés ont peu d’autonomie, on y trouve aussi des styles persuasifs avec plus d’autonomie. Par contre, pour des approches plus participatives ou délégatives, les différences se marquent entre entreprises et sport. En entreprise, les orientations et facteurs de performance sont définis par les managers, puis les équipes construisent les solutions.
Au niveau des sports collectifs, ça ne ne fonctionne pas comme cela : l’entraîneur définit les objectifs avec le club ou la fédération. Les plans d’entrainement sont définis par l’équipe d’entraineurs…..par contre, une fois sur le terrain, la délégation est poussée très loin.
(4) Gérer la cohérence du groupe
Un entraîneur d’une équipe de sport doit avoir des relais dans son équipe: des joueurs qui motivent leurs coéquipiers, font passer les messages clé et remontent également l’information. Cela permet d’avoir une gestion tactique, technique la plus efficiente et la plus positive possible.
5/L’intégrité à long terme de ses employés : une préoccupation majeure
Dans le monde du sport, le manager a une priorité : préserver l’intégrité de son athlète. Si ce-dernier est blessé physiquement ou moralement, il ne peut plus s’entraîner ni performer. L’outil de production est donc en panne.
Dans l’entreprise, bien que des évolutions soient à relever, on est encore très loin de ce genre de considérations. On n’a jamais autant parlé de burn-out! L’intégrité physique et mentale des salariés ne fait généralement pas partie des préoccupations premières. Dans l’univers sportif, au moindre coup de fatigue ou de blessure, les experts mettent directement en avant l’erreur éventuelle de l’entraîneur.
Or, l’entreprise s’est pourtant inspirée du sport, mais à d’autres niveaux : ceux de l’engagement, de la réussite individuelle, de la méritocratie. Mais l’entreprise n’a fait que s’approprier la symbolique du sport, ce qui est visible : la performance au moment de la compétition. Elle n’a pas intégré l’écosystème sportif en amont de la performance : les entraînements, la gestion délicate de l’intégrité physique et mentale des athlètes.
Fortes de ce constat, certaines structures ont développé ces dix dernières années des activités sportives pour leurs salariés, à l’instar de Coca-Cola. Les managers se rendent compte qu’avoir une activité professionnelle sédentaire peut s’avérer nuisible pour l’entreprise. Des efforts sont également entrepris afin d’améliorer l’ergonomie du matériel utilisé.
(6) Le sport, vecteur de l’esprit d’équipe en entreprise
Organiser des rencontres de football, de rugby ou autres entre équipes d’une entreprise peut s’avérer très bénéfique : le sport a cette particularité d’être à la fois un vecteur de proximité, de santé.
Qui dit sport (collectif) dit mouvement, qui dit mouvement dit corps et qui dit corps en mouvement dit contact physique. Il n’y a pas de vraie proximité sans contact physique. Le sport permet de générer des situations favorisant la proximité sociale et psychologique, cruciale pour le travail en équipes.
(7) De l’influence du marketing sportif en entreprise
Depuis 1928, Coca-Cola met le sport au cœur de sa stratégie commerciale. Ses managers ont compris que le sport permettait de renforcer l’attractivité des produits et des marques, a fortiori lorsque la valeur intrinsèque du produit est faible : il faut mettre de l’émotion autour d’une cannette de manière à la vendre à un prix optimum.
Puis, ils ont pensé qu’il fallait développer des valeurs cohérentes en interne, en mettant en place des activités sportives au sein de leurs structures.
Aujourd’hui, beaucoup d’entreprises sont ainsi en connexion constante avec le monde du sport : les équipementiers par exemple. Chez Adidas, la culture d’entreprise est très conviviale, directe, orientés résultat, facile sur le plan relationnel : l’entreprise s’est appropriée la culture du sport.
(8) L’action : la meilleure façon d’apprendre
Les principes du sport peuvent grandement aider à guider la formation des futurs managers. Premièrement, la meilleure façon d’apprendre est de faire. Ensuite, la théorie a toute son importance. Un entraîneur sportif qui ne connaît rien à la biomécanique, ou à la psychologie, par exemples, va être très vite limité. Il en va de même pour les managers. On imagine très bien qu’un responsable marketing qui ne connait pas les modèles théoriques de marque navigue sans boussole.
Enfin, un chef d’équipe efficient est bien plus qu’un cerveau brillant. Le monde sportif a intégré cela depuis bien longtemps. Les institutions formants les futurs cadres devraient en prendre pleinement conscience. : il n’est pas possible d’être performant sans être affuté sur le plan intellectuel, émotionnel et comportemental.
(9) La règle comme préalable
Le monde du sport est fondamentalement attaché à la règle : sans elle, le jeu ne peut être respecté. La règle est constitutive de l’activité sportive. Sa définition est un préalable au lancement de l’activité. Le grand public l’a bien intégré. C’est pour cela que des scandales hautement médiatisés apparaissent dès qu’il y a transgression.
A l’inverse, souvent, dans le monde économique, la règle apparaît en réaction lorsque des dérapages ont été constatés.
(10) Ce que l’entreprise peut apprendre au sport
Le grand challenge auquel fait face le monde du sport consiste à réduire l’écart entre les valeurs affichées et celles réellement pratiquées. Beaucoup d’organisations nationales ou internationales ne sont pas suffisamment focalisées sur leur core business. Elles sont fortement concentrées sur la partie commerciale de leurs activités, vendre des droits médias par exemple, ou augmenter le nombre de pays participants à une compétition au détriment du développement de leur pratique sportive. Or, une entreprise qui n’est pas focalisée sur son core business est en danger. A ce titre, les mutations internes que mettent en place des organismes sportifs internationaux tels le CIO, l’UEFA, la FIBA ou World Rugby sont exemplaires
Le monde du sport doit donc apprendre du monde de l’entreprise à rester centré sur son business, d’en assurer la pérennité et faire en sorte que la pratique sportive soit mesurée comme le développement de n’importe quel produit.